Tendances et défis de la ville post-carbone

Article initialement publié sur le site du groupe Egis en décembre 2019.

Nous le martelions déjà il y a 3 ans dans « Paris change d’ère », viser la neutralité carbone est un impératif, rationnel, raisonnable, possible, attrayant, et dépassable, qu’il faut activer à chaque niveau de la société. La population mondiale étant très majoritairement urbaine (1) le lieu, au sens spatial comme symbolique, d’activation de cette ambition est donc très logiquement la ville. Cette visions positive d’une ville neutre en carbone reste plus que jamais d’actualité à l’aune d’un été 2018 qui a été le 2ème plus chaud depuis 1900.

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Remettre l’usager-habitant au centre des réflexions urbaines

Nous croyons souvent qu’il est possible d’entrer dans cette nouvelle ère par le bâtiment en se fixant des objectifs extrêmement vertueux (voir notre article E+C-). C’est bien mais on ne parlerait dès lors que du quart du bilan carbone global alors qu’il faut s’adresser à la totalité de notre bilan, nos 10tCO2e annuel (2) : en remettant l’humain au centre du projet nous agissons sur l’ensemble de notre empreinte carbone.

Une fois la technique maitrisée, il faut agir sur les usages, de la programmation à la construction, qui sont presque toujours oubliés : ainsi par exemple « l’effet rebond » qui empêche de réduire les consommations ou l’augmentation de la surface des logements depuis 30 ans. Il est intéressant de noter qu’un bon commissionnement, parfois imposé par les certifications récentes, permet justement de réduire cet effet rebond. C’est ici une force d’une équipe pluridisciplinaire intégrée.

Il est aussi important de travailler avec les habitants, soit par une approche externe et des nudges (3) par exemple soit avec une implication réelle et participative pendant la conception et pendant le chantier. Les nouveaux outils en plus de la domotique ou de l’internet des objets, malgré certains défauts comme la consommation énergétique induite, permettent de parfaitement caler les besoins des usagers avec les réelles possibilités de la ville.

Le quartier, laboratoire de la ville durable

Entre l’échelle de l’usager/habitant et la ville nous pensons que la bonne échelle est le quartier. Et disant cela, on remarque effectivement depuis quelques années, ce glissement d’échelle intéressant. Un bâtiment seul, si iconique et performant soit-il, ne permet pas d’atteindre les objectifs de la neutralité en carbone. C’est physiquement impossible. L’échelle spatiale et l’échelle de réflexion, du quartier devient la référence puisqu’elle permet des synergies entre les différents usages et périodes. Le quartier permet aussi d’envisager la séquestration en dehors d’une simple structure bois et donc de s’approcher plus réellement de la neutralité carbone (4). Il permet également de porter une vision sur l’approvisionnement en objets et matière et de travailler sur l’alimentation. C’est une approche par le métabolisme (5).

L’un des gros défis consiste donc à proposer une vision élargie prenant en compte l’ensemble de ces paramètres et nous pensons qu’une stratégie carbone à l’échelle du quartier est idéale pour y arriver.

Par contre il s’agit de mettre en place une stratégie et non pas un saupoudrage de solutions hors contexte et sans ancrage territorial, la limite est souvent floue et difficile à intégrer.

« Les spécialistes du bâti sont amenés à raisonner de plus en plus à grande échelle.»
Giuseppe Peronato
analyste énergie-climat- Elioth
INVENTER BRUNESEAU : UN QUARTIER TRÈS BAS CARBONE

Retour des activités de production en ville

Il devient véritablement intéressant et prospectif de réfléchir à la manière de réintégrer une production dans les villes : la ville du futur sera bien plus productive qu’elle ne l’est actuellement à la fois pour avoir une certaine résilience et pour relancer des échanges plus vertueux entre territoires. Il s’agit d’estomper la division du territoire entre espaces productifs à l’extérieur des villes (hinterland) et les espaces consommateurs à l’intérieur. Le bassin productif, en intégrant pleinement la ville, doit se rétrécir afin de limiter les déplacements et récréer un tissus industriel local.

Notons qu’un espace productif peut tout à fait être énergétique, alimentaire et un espace qui séquestre le reliquat carbone de la ville.

N’oublions pas des batiments écologiques

S’il faut parfois passer par la radicalité de projets d’infrastructures solaires, reconnaissons aussi que nous savons faire des bâtiments performants.

Depuis la cinquième façade avec Le Corbusier2, qui met en avant le toit qui joue aujourd’hui un rôle primordial dans l’enjeu climatique grâce à son positionnement stratégique d’interface avec l’atmosphère, depuis son invention des « brise-soleil », depuis les successives réglementation thermiques, depuis la parité réseau et l’usage du biosourcé, depuis qu’il commence à exister une valeur verte du bati, ne pas faire des bâtiments performants, bioclimatiques, à faible empreinte carbone est une gageure pour les 50 années à venir.

D’une manière similaire, les éléments de façade ont désormais acquis de nouvelles capacités : celles de produire de l’électricité et d’accueillir des surfaces végétalisées. Le temps de quatre façades vitrées identiques est fini à l’heure où nous savons calculer le moindre watt sur n’importe quel point d’une maquette numérique. Et c’est peut-être justement la végétation et par extension le bâtiment avec un rôle de régulateur thermique dans la ville, qui sera au centre de la transition énergétique et climatique.

Quant au bois, qui est désormais aussi utilisé dans des immeubles de grand hauteur, il est le matériau constructif de référence pour atteindre les objectifs carbone grâce à son potentiel de stockage du dioxyde de carbone (CO2).

Les villes et le climat

Le plus grand défi en ville est la hausse des températures due au changement climatique, l’effet d’îlot de chaleur se cumulant à la canicule pour modifier en pire le microclimat. L’été 2003 a dramatiquement montré la fragilité de la population face à une canicule exceptionnelle, et ces fragilités s’accentuent en milieu urbain, là où les disparités des conditions de vie sont les plus grandes et les espaces anthropisés moins résilients face à la nature.

La ville du futur devra donc être exemplaire d’un point de vue carbone, tout en étant résiliente face aux aléas climatiques. Le challenge qui nous attend est celui de la balance confort carbone dont la solution ne passera pas uniquement par une solution technique mais bien par une transition à la manière des bien nommées « villes en transition » de Rob Hopkins.

1 Principe qui consiste à totalement compenser les émissions de gaz à effet de serre dans l’atmosphère dues à l’utilisation des énergies fossiles.

2 Architecte-urbaniste, 1887-1865

3 Système de toiture capable de réfléchir la chaleur solaire et de maintenir froides les surfaces de toitures sous le soleil.

4 Notons que le GIEC dans son dernier rapport sur un réchauffement à 1.5°C le stockage carbone est presque obligatoire.

5 Voir à Paris, http://metabolsime.paris.fr

Confrontés au défi des transitions énergétiques, climatiques et à l’épuisement des ressources, notre approche tente de réinventer les modes de conception.

Philosophie​

Répondre à l’urgence climatique en transformant durablement les bâtiments et tissus urbains.

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